Benoît XVI aura-t-il droit à des funérailles de pape ?



Le pape émérite s’est éteint à l’âge de 95 ans. Ses obsèques auront lieu le 5 janvier et seront présidées par le pape François.

La «renonciation» de Benoît XVI en 2013
aura posé des problèmes inédits aux usages pourtant bien huilés du monde du Vatican. Ses obsèques apportent aussi une série de questions nouvelles, dont celle du rituel des funérailles et de la sépulture du pape émérite. Giovanni Maria Vian qui fut le directeur de l’Osservatore Romano et qui connaît le détail des arcanes du Vatican résume : «Il va falloir tenir deux exigences, souligner que Benoit XVI n’était plus le pape mais qu’il a été pape.»

Sauf l’émotion de la mort d’un pape qui est toujours un événement majeur à Rome, le paradoxe des honneurs dus à un homme qui fut pape et ne l’est plus, captive déjà les «liturgistes», ces spécialistes de la liturgie romaine maîtres dans l’art de célébrer, et les canonistes, experts du droit canonique, le droit de l’Église catholique qui en réglemente la vie courante. Mais c’est le pape François qui tranchera. Il est probable, selon différentes sources, qu’il décidera d’obsèques dignes d’un pape régnant.

Tout cela reste cependant de l’ordre de l’hypothèse. On ne savait encore rien, le jour de la mort de Benoît XVI, sur la façon dont les choses se passeraient alors qu’un texte juridique existe pourtant sur «la vacance du siège apostolique et sur l’élection du pontife romain». Il s’agit de la « constitution apostolique Universi Dominici Gregis ». Jean-Paul II la réforma en 1996, elle fut ensuite amendée par Benoît XVI puis par François. Elle décrit par le menu les circonstances de la déclaration de la mort du pape, les funérailles et l’élection du successeur. Le cas d’un pape émérite n’est toutefois pas prévu.

Le chapitre V de ce document accessible à tous sur le site du Vatican consacre six paragraphes aux «funérailles du pontife romain». Le premier prévoit qu’une fois la mort du pape annoncée, «les cardinaux célébreront pendant neuf jours consécutifs les services funèbres pour le repos de son âme». Pourquoi neuf jours ? La coutume – christianisée depuis – remonte au rituel de la mort des empereurs romains. Mais ces prières peuvent se faire une fois l’enterrement accompli. La messe de funérailles doit intervenir entre le 4e et le 6e jour suivant la mort du pape, de façon à laisser le temps à ceux qui le désirent de venir à Rome pour rendre un dernier hommage au pape.

Messe solennelle

Puis le document précise qu’un «procès-verbal authentique» sera rédigé par trois personnes différentes, devant trois groupes de témoins différents, pour certifier sans doute possible que «l’inhumation a eu lieu». On prévient également qu’il est interdit de «prendre, en utilisant quelque moyen que ce soit, des images du Souverain Pontife alité et malade ou défunt, ni d’enregistrer avec quelque procédé que ce soit, ses paroles pour les reproduire par la suite». Autre détail, «aucune pièce de l’appartement privé» du pape «ne sera habitée» après l’inhumation et pendant l’élection du nouveau Pape. Enfin, si le pape défunt a laissé un «testament concernant ses biens», l’exécuteur testamentaire devra prendre les dispositions nécessaires dont il «rendra compte au nouveau Souverain Pontife».

Rien, en revanche, dans ce document, sur le détail de la liturgie de funérailles. Elle est insérée, comme pour toutes les obsèques catholiques, dans une messe solennelle. Les honneurs dus au rang de pape, en plus.

Les attributs d’un simple évêque

Ils sont rendus en trois lieux et trois temps différents. Dans le palais apostolique où le corps du pape est exposé à la prière des responsables du Vatican. Dans la basilique Saint-Pierre où il est vénéré par les fidèles, des plus simples aux chefs d’État. Le corps du pape alors visible est revêtu des vêtements pontificaux, du bâton pastoral, de la mitre et du pallium. Le cercueil du théologue allemand sera exposé de lundi à mercredi. Il devrait être paré des attributs d’un simple évêque, celui de Rome.


Troisième temps, le corps du pape est déposé dans un cercueil en cyprès, un bois très résistant à l’eau, son visage recouvert d’une soie blanche. La messe des funérailles peut se dérouler dans la basilique Saint-Pierre comme sur l’esplanade comme ce fut le cas pour Paul VI, Jean-Paul Ier, Jean-Paul II. En l’occurrence elle aura lieu en extérieur, ce jeudi 5 janvier. Le cercueil est déposé à même le sol, un évangile posé sur lui et un cierge pascal. Tous les cardinaux présents et évêques sont revêtus de rouge. Dans le cas de Benoît XVI, François présidera la messe, et non le doyen du collège des cardinaux.

Enfin, le cercueil, placé dans un cercueil en zinc, puis dans un cercueil en bois, est enterré dans l’une des cryptes sous la basilique Saint-Pierre. Il se dit à Rome que le pape émérite aurait émis le souhait d’être inhumé dans le caveau, actuellement libre, où les corps de Jean XXIII, puis Jean-Paul II, avaient été déposés avant d’être remontés dans la basilique, une fois canonisés, en 2013. Depuis le début du XXe siècle, tous les papes sont enterrés dans la basilique Saint-Pierre.

Par Jean-Marie Guénois/lefigaro.net