« Aujourd’hui, il n’y a pas eu de référendum d’autodétermination en Catalogne. Aujourd’hui, nous tous les Espagnols avons constaté que notre Etat de droit conserve sa force et son bien fondé. Aujourd’hui nous n’avons pas assisté à une consultation, mais à un simulacre. » Si le référendum de ce dimanche en Catalogne n’a pas de valeur aux yeux de Madrid, l’image du chef de gouvernement Mariano Rajoy, l’auteur de cette déclaration hier soir, a été passablement écornée, relate notre envoyé spécial François Musseau. Les vidéos de violences policières contre des votants catalans souvent pacifiques et sans défense ont fait le tour des réseaux sociaux et ont été reprises dans tous les médias espagnols et internationaux.
« Cela m’a beaucoup choqué, parce que je n’avais jamais imaginé que la police espagnole pouvait faire ça, commente à froid Oriol de Balanzo, un chroniqueur radio catalan de 38 ans, qui a pu voter ce dimanche. Je savais qu’il y avait à peu près 10 000 policiers espagnols qui étaient venus pour essayer d’arrêter [la consultation], mais je n’avais jamais imaginé qu’ils arriveraient à utiliser la violence contre des gens qui voulaient voter. »
Rajoy isolé
Politiquement Rajoy est plus isolé que jamais et il va lui être très difficile de tendre des ponts avec l’opposition : Podemos refuse de parler avec lui, les socialistes sont très critiques avec « un Rajoy incapable et autoritariste ». « Un jour triste pour notre démocratie », a également commenté sur Twitter le secrétaire général du PSOE, Pedro Sanchez.
Quant au séparatiste Carles Puigdemont, il n’a certes pas pu organiser le referendum qu’il souhaitait sans commission électorale, dissoute par la justice. Il est aussi à la tête d’une société catalane plus divisée que jamais. Mais le leader indépendantiste à certainement gagné des adeptes, il a su exploité sa position d’infériorité et de victime vis-à-vis de l’Etat espagnol.
Et pour le président de la région, avec 90% de « oui », les Catalans ont gagné « le droit d’avoir un Etat indépendant qui prenne la forme d’une République ».
DECLARATION
Il lui reste aujourd’hui à affronter une situation très compliquée : ou il convoque immédiatement des législatives anticipées où il peut espérer emporter la majorité absolue, ou bien il fait ce qu’il a promis, c’est-à-dire demander au Parlement autonome de déclarer l’indépendance de manière unilatérale.
En effet, en vertu de la loi votée le 6 septembre par la majorité séparatiste, l’indépendance doit être proclamée dans les 48 heures suivant une victoire du « oui ». Ce qui constituerait un véritable saut dans l’inconnu que Madrid n’acceptera jamais.
« Je crois qu’aujourd’hui, la Catalogne a déconnecté de l’Espagne, conclut Oriol de Balanzo. Je crois qu’aujourd’hui la majorité de la population catalane a dit au revoir à l’Espagne, même des gens qui hier ou la semaine dernière pensaient qu’il y avait toujours une possibilité d’ accord avec l’Espagne. »