Le président américain Donald Trump a interdit mercredi aux réseaux américains de télécommunications de se fournir en équipements auprès d’entreprises jugées à risque. La mesure vise en priorité la Chine et le géant du secteur, Huawei.
C’est la mesure la plus sévère à ce jour prise par les États-Unis contre le secteur technologique chinois. Le président américain Donald Trump a signé mercredi 15 mai un décret interdisant aux entreprises américaines de télécoms de s’équiper auprès de sociétés étrangères jugées à risque. En pleines tensions commerciales avec Pékin, Donald Trump a déclaré une « urgence nationale » pour prendre cette décision et vise notamment le géant chinois des télécoms Huawei, depuis longtemps dans le collimateur des autorités américaines.
L’intéressé ne s’y est d’ailleurs pas trompé : ces « restrictions déraisonnables empiéteront sur les droits de Huawei« , a dénoncé le groupe chinois. Elles ne feront, en outre, que « cantonner les États-Unis à des alternatives inférieures et plus coûteuses » en matière de 5G, la cinquième génération de télécommunications mobiles, a averti l’entreprise dans un communiqué. Huawei se présente en effet comme « le leader sans rival de la 5G ».
Selon la Maison Blanche, le décret est justifié par le fait que des « adversaires étrangers exploitent de façon croissante des vulnérabilités dans les services et les infrastructures technologiques de l’information et de la communication aux États-Unis ». Pour Pékin, il s’agit au contraire d’une manœuvre déloyale faussant la concurrence.
Le décret présidentiel assure répondre aux « actes malveillants favorisés par internet, dont l’espionnage économique et industriel au détriment des États-Unis et de sa population ».
Guerre commerciale entre les deux premières économies de la planète
L’enjeu technologique domine actuellement la rivalité commerciale entre Pékin et Washington. Les deux premières économies mondiales s’affrontent par l’imposition mutuelle de droits de douane accrus depuis que Donald Trump a lancé les hostilités après avoir fait de la Chine une des cibles favorites de sa campagne présidentielle de 2016.
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Avec le secrétaire d’État américain Mike Pompeo en première ligne, les États-Unis mènent depuis plusieurs mois une charge contre Huawei, qu’ils soupçonnent d’espionnage pour le compte de Pékin. Le Pentagone a également multiplié les mises en garde.
Les États-Unis ont ainsi exclu la firme chinoise du déploiement de la 5G sur leur sol et tentent de convaincre leurs alliés occidentaux d’en faire autant en avertissant des multiples dangers d’espionnage dans un monde où la cinquième génération augmentera la foule d’objets connectés, des voitures aux caméras de sécurité.
Mercredi, le ministère américain du Commerce a enfoncé le clou en plaçant Huawei sur une liste d’entreprises suspectes auprès desquelles on ne peut commercer qu’après avoir obtenu un feu vert des autorités.
« Cela évitera que des technologies américaines ne soient utilisées par des entités étrangères à des fins qui nuiraient à la sécurité nationale des États-Unis ou à leurs intérêts de politique étrangère », a expliqué le secrétaire au Commerce, Wilbur Ross.
La guerre technologique « n’est pas approprié »
S’exprimant sur le sujet, le président français Emmanuel Macron a jugé jeudi qu’il n’était « pas approprié » de « lancer maintenant une guerre technologique ou une guerre commerciale vis-à-vis de quelque pays que ce soit. »
Pour lui, « ce n’est pas le meilleur moyen » de défendre la sécurité nationale d’un pays ni de faire « baisser les tensions ».
« Notre perspective n’est pas de bloquer Huawei ou toute autre entreprise mais de préserver notre sécurité nationale et la souveraineté européenne », a souligné Emmanuel Macron, qui s’exprimait en anglais, au salon VivaTech à Paris. Il a souligné que « la France et l’Europe [étaient] pragmatiques et réalistes ». « Nous voulons développer l’emploi, les affaires, l’innovation. Nous croyons à la coopération et au multilatéralisme ».
« En même temps, pour la 5G, nous faisons très attention à l’accès aux technologies cœur de réseau pour préserver notre sécurité nationale », a-t-il assuré.
Les composants chinois, « chevaux de Troie » ?
L’an dernier, l’administration Trump avait failli causer la mort de l’entreprise chinoise ZTE en lui interdisant pendant plusieurs mois d’acheter des puces électroniques produites uniquement aux États-Unis.
L’arrestation en décembre de la directrice financière de Huawei à Vancouver (Canada), à la demande de la justice américaine, a envenimé les choses. Meng Wanzhou est soupçonnée d’avoir menti à plusieurs banques pour que Huawei puisse accéder au marché iranien entre 2009 et 2014, en violation des sanctions américaines. Elle risque une extradition vers les États-Unis.
De nombreux élus américains, démocrates comme républicains, ont adopté de leur côté une attitude de plus en plus méfiante vis-à-vis des géants technologiques chinois comme Huawei et ZTE, deux groupes étroitement liés aux autorités à Pékin.
« Les sociétés de télécoms chinoises comme Huawei sont en fait le bras du Parti communiste chinois chargé de collecter des informations », a estimé mercredi le sénateur républicain Tom Cotton.
Ce proche de Donald Trump a assimilé les composants informatiques vendus par ces sociétés à des « chevaux de Troie » mettant en péril les réseaux informatiques sur la planète.
Avec AFP