Il faut avoir sillonné les coins de la ville province de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo pour constater que des enfants de moins de 12 ans travaillent dans des bars, d’autres vendeurs ambulants deau… sans aucune sécurité sociale. Ce qui empêche, en principe, leur développement physique et mental avec une exposition sanitaire grandissante.
À Kinshasa, des milliers d’enfants, sans compter ceux de la rue et les orphelins, sont en danger, sans secours de la part de ceux qui sont censés les protéger.
Pour ceux-là qui vendent le long du Boulevard du 30 juin, ils sont très souvent traqués par les éléments de la Police nationale congolaise fuyant çà et là, avec tous les risques possibles de se faire écraser par des véhicules circulants.
Alors que la convention 138 des NIT dont la République démocratique du Congo, État membre de l’Organisation internationale du travail, a ratifié, stipule: «Tout membre pour lequel la présente convention est en vigueur s’engage à poursuivre une politique nationale visant à assurer l’abolition effective du travail des enfants et à élever progressivement l’âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail à un niveau permettant aux adolescents d’atteindre le plus complet développement physique et mental».
Aussi, c’est un droit pour chaque enfant d’être protégé et c’est la Convention relative aux Droits de l’Enfant -CDE- qui garantit impérativement cette protection. Selon la CDE, « Les États parties reconnaissent le droit de l’enfant d’être protégé contre l’exploitation économique et de n’être astreint à aucun travail comportant des risques ou susceptible de compromettre son éducation ou de nuire à sa santé ou à son développement physique, spirituel, moral ou social».
L’ONG Journalistes pour les droits de lenfant -JOUDEN- a, quant à lui, dénoncé ce même travail des enfants dans la ville de Kinshasa. Il y a de ces enfants qui vendent des cigarettes, des produits de champs, des produits aphrodisiaques dans les artères de la capitale RD-congolaise.
Les statistiques exactes n’étant pas encore disponibles, l’ONG JOUDEN estime que ce sont des milliers d’enfants qui sont livrés au travail sous diverses formes. «La situation reste chaotique », regrette JOUDEN. Le Directeur exécutif de JOUDEN, Serge Mukendi Mbuyi, déplore une «indifférence» de la part des autorités du pays, qui «doit prendre fin».
Dans un entretien qu’il nous a accordé, l’auteur du livre « Le travail des enfants à Kinshasa. Formes et descriptions», Crispin Kobolongo Kongunde laisse savoir que cette problématique est principalement localisée à Kinshasa (capitale de République Démocratique du Congo). Toutefois, les enfants de la rue sont également présents dans toutes les autres régions de la RDC. Le nombre d’enfants des rues est estimé aujourd’hui à 70.000, ceci révélant la situation dramatique dans laquelle ces derniers vivent.
Paru aux éditions « Mabiki », l’ouvrage de Crispin Kobolongo Kongunde décrit les différentes formes de travail des enfants dans la ville de Kinshasa. L’âge moyen de ces enfants est de 12 ans et une partie croissante d’entre eux se retrouvent dans cette situation car ils sont désignés comme étant des enfants sorciers.
« La sorcellerie présente en RDC conduit parfois les parents à chasser leurs enfants de chez eux. En effet, dès lors que l’enfant montre des « symptômes de comportements étranges » (sommeil agité, petite taille, appétit) et qu’une autorité spirituelle a confirmé qu’il était un sorcier, alors il est violenté et chassé de chez lui. Une fois chassés, les enfants sont alors livrés à eux mêmes et doivent donc travailler, mendier ou se prostituer », a expliqué le professeur.
Travail des Enfants
Les frais de scolarité étant bien souvent excessifs pour les parents, ces derniers emmènent parfois leurs enfants à travailler avec eux ou seuls. L’enfant joue alors un rôle économique important pour sa famille, car les salaires sont si bas qu’ils ne permettent pas de nourrir une famille.
Les enfants sont alors contraints de vendre de l’eau froide en sachet, cigarettes ou travailler dans des bars.
Ce travail nécessaire pour leur assurer un minimum alimentaire vital, enfreint l’article 32 de la Convention des Droits de l’Enfant proclamant la protection des enfants de l’exploitation économique.
Approché par la rédaction du Journal des Nations, ces enfants travaillant durement, voire jusque tard la nuit, dans des bars, bistrots et vendeurs ambulants, laissent entendre qu’ils font ce travail parce qu’ayant perdu leurs parents. Pour certains, c’est à cause de la pauvreté et le chômage qui sévissent leurs familles.
«J’ai commencé à vendre de l’eau en sachet il ya déjà 5 ans, j’accompagnais ma mère. Je n’étudie pas, par manque de moyens. Et aujourdhui, maman n’est plus, papa ne travaille pas, je continue à me battre avec ce travail pour subvenir à mes besoins», relate la petite Marthe Mbemba.
Pour sa part, Christian Pongo renchérit: «moi, j’etais élève. Je me suis retrouvé dans ce travail de bars après la mort de mes parents biologiques».
De notre côté, après avoir tenté, à maintes reprises, d’obtenir un rendez-vous ferme avec l’inspecteur général du travail pour qu’il s’exprime à ce sujet sans succès, un inspecteur qui a requis l’anonymat a été pourtant souple pour combler ce refus stratégique de son supérieur qui nous a fait marcher pendant autant des semaines.
Il nous a fait savoir ceci : «l’inspection du travail et son ministère sont bel et bien au courant de tout ça. La traque de ces enfants sur les rues de Kinshasa fait partie de l’engagement que notre pays avait pris avec l’Organisation internationale du travail en ratifiant la convention 138. Donc, l’État travaille pour que ce fléau qui ronge les enfants soit éradiqué». Une implication, selon le constat, reste encore sans aucun effet responsable.
René KANZUKU