À quatre semaines de la prise du pouvoir du nouveau président congolais Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi, les prisonniers politiques, tous opposants, réputés injustement écroués restent encore en geôle, entre autres Franck Diongo et Diomi Ndongala. Les exilés politiques, n’en parlons même pas. Sous d’autres cieux, la libération et le retour de ces derniers seraient automatiques, voire primordiaux ou prioritaires, étant donné que Tshilombo est issu de cette même opposition. Aussi, pour couper court aux rumeurs selon lesquelles Kabila aurait toujours la main mise sur toutes les décisions du pays. C’est le cas Moïse Katumbi qui laisse plus à réfléchir. Katumbi fut un bon ami du défunt père de Félix, voir même un ami de cœur, disons un ami de la famille Tshisekedi. Les navettes du père de ce nouveau leader congolais étaient toujours à charge de Katumbi, de son vivant. Il n’utilisait que le jet privé de Moïse pour se rendre en Europe.
Après la mort d’Étienne Tshisekedi, Félix a davantage noué avec le président du célèbre club congolais de football TP Mazembe et patron du regroupement politique, Ensemble, Moïse Katumbi Chapwe. Pour preuve, cétait Félix le candidat unique de Katumbi pour la présidentielle du 30 décembre 2018, lors de la formation de la coalition Lamuka en Genève. Résidant jusque-là en Belgique, Katumbi a été condamné à son absence par la justice congolaise, pour une affaire de spoliation pendant les règnes de Kabila, laquelle affaire s’était avérée monter de toutes pièces, caractérisée par la fuite en cascade des juges en Europe.
Depuis la proclamation par la CENI et la confirmation par la Cour constitutionnelle d’une victoire contestée jusque-là par un autre opposant, Martin Fayulu, Félix n’a reçu aucune expression de félicitation de la part de son meilleur ami.
Peut-on penser que Katumbi s’est inscrit, comme tout congolais, dans la logique de dénonciation d’une élection frauduleuse de Félix? Ou parce que Félix a publiquement déclaré que l’ennemi juré (Joseph Kabila) de son meilleur (Katumbi) est maintenant son partenaire et que toutes les exactions commises par l’ancien régime sont effacées? Ces questions auront probablement leurs réponses ce dimanche 24 février lors d’une conférence de presse que tiendra la plateforme Ensemble à Kinshasa. L’heure est grave.
Félix Tshisekedi se retrouve donc, entre un ami de cœur et un ennemi juré. Il a, entre sauver Katumbi et les autres prisonniers et demeurer loyal à Kabila, selon les clauses de leur accord politique. Déjà, lors d’une interview au journal français Le Monde, Kabila avait taxé Katumbi de Judas Iscariot. Félix permettra-t-il le retour de Katumbi et les autres en RD-Congo? Quand on pose pareille question à ses proches, la seule réponse qui revient est: il vient juste d’arriver au pouvoir, laissons-lui le temps, il n’a pas que ça à faire.
Avec toutes les assurances que se nourrissent Kabila et son camp, peut-on espérer à une éventuelle libération des prisonniers ou retour des exilés? Cette dernière question qui taraude l’esprit de plusieurs congolais, reste pendante, attendons les grands enjeux politiques, donc la mise en place du nouveau gouvernement qui intervient incessamment.
Ce qui est sûr, la non libération des prisonniers politiques ou le retour des exilés, renforceraient au sein de l’opinion, la thèse selon laquelle, Félix Tshisekedi na pas été élu, il est là sur base d’un arrangement politique, donc il demeure à la merci de l’ancien régime.
Les préparatifs qui craignent
Pendant ce temps, l’ex-président congolais, Joseph Kabila et ses hommes, mettent toutes les batteries en marche pour la Primature, l’Assemblée nationale et probablement le Senat, et poussent Félix à mettre les bouchées doubles. Et là, on ne sait pas encore si Tshilombo aura la présidence, les règnes ou le pouvoir.
Les chefs des différents regroupements membres du Front Commun pour le Congo -FCC- se sont retrouvés autour de Joseph Kabila ce mercredi 20 février dans sa ferme de Kingakati. Ces derniers ont signé un acte d’engagement et ont réaffirmé leurs fidélité et loyauté à l’ancien chef de l’État. Ils s’engagent à demeurer unis et solidaires sous le leadership de Kabila.
Le FCC revendique plus de 340 députés nationaux et le contrôle de 25 assemblées provinciales. «Toutes les majorités sont nôtres, au niveau de l’Assemblée nationale et au niveau des 25 provinces de la République. Il fallait se retrouver et réaffirmer notre loyauté. Cela a été fait de manière solennelle. La suite, c’est travailler darrache-pied avec chaque député membre du FCC », a déclaré l’ancien speaker de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku.
Et de poursuivre: «Dans un État de démocratie et nous nous forçons de l’être, le pouvoir parlementaire, c’est un pouvoir important, hormis bien évidemment le président de la République. Au parlement, on a plus de 340 députés nationaux. On ne pouvait en aucun moment être inquiet. C’est pour cela nous nous organisons en toute sérénité autour de notre chef. On n’a jamais eu peur, en aucun moment. La majorité parlementaire, c’est le FCC. Nous nous organisons. Nous allons mettre en place les différents organes. Nos députés vont se retrouver pour affiner ensemble nos stratégies et entamer le chantier de cette législature, qui est un chantier important par rapport aux différentes réformes».
Patrick NZAZI