La coupe est presque pleine! Lisez…


La coupe est presque pleine. Quand elle débordera les acteurs politiques de l’Opposition ne seront pas plus épargnés que ceux de la Majorité présidentielle. Ils sont, en tout cas pour la plupart, coupables d’avoir trahi et exploité le peuple en flattant ses aspirations.
«Nous ne sommes pas un peuple de la Communauté internationale, nous sommes un peuple de Dieu». John Muteba Ngongo, coordonnateur de l’Asbl Lisanga Lumumba, a déclaré cela lors d’un échange avec la CIME, structure chargée de la médiation des conflits électoraux. Au vu de la situation politique que traverse la République démocratique du Congo, cette petite phrase m’a profondément touché. Je ne crois pas que ce Muteba s’eut, même une minute, attendu à un tel effet.
Mais la réalité est là. Ce citoyen lambda et ses camarades m’ont semblé avoir une meilleure idée de ce qu’est la RDC que la plupart d’acteurs politiques et sociaux, jeunes ou vieux, qui envahissent les médias. Nous ne sommes pas un peuple de la communauté internationale! Cet appel devrait être entendu par les acteurs politiques, de la Majorité comme de l’Opposition, qui ont engagé une joute infernale au nom du bien-être de la population RD-congolaise. Joute qui pourtant ne fait qu’envoyer chaque jour davantage des RD-Congolais six pieds sous terre.
Deux semaines depuis que le calendrier électoral rendu public par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), le débat se polarise sur le rejet de ce dernier. Dans l’Opposition, l’on se félicite que des partis politiques et la Société civile proche des opposants fassent chorus autour du boycott dudit calendrier.
Cependant, les mêmes gens divergent dans leur prise de position quant à la raison du rejet. Par exemple, Delly Sesanga et Lucha proposent, au mépris de la Constitution de la République, dautres calendriers fixant les élections présidentielle, législatives nationales et provinciales couplées en juin ou juillet, alors que la CENI, institution habilitée pour ce travail, prévoit celles-ci le 23 décembre 2018.
Au Rassop, Félix Tshisekedi et Moïse Katumbi continuent à réclamer une transition sans Joseph Kabila dont le second mandat à la tête du pays a pris fin en décembre 2016, mais qui est toujours en place selon l’esprit de la Constitution qui a été, on doit le dire entériné par l’Accord de la Saint-Sylvestre.
A la MP, certains acteurs accusent des opposants de craindre les élections. Et d’autres estiment qu’en demandant une transition sans Kabila, le Rassop lance plutôt des appels des pieds à l’endroit du pouvoir. Cela pourrait ne pas être totalement faux.
Vouloir une transition suppose un dialogue préalable. Et en RD-Congo, qui dit dialogue dit partage du gâteau. La composition des gouvernements de Samy Badibanga et aujourdhui de Bruno Tshibala en dit long. Cela rappelle bien les années 90 sous Mobutu, où le poste de Premier ministre était devenu une propriété de l’Union sacrée de l’Opposition.
Mais où est l’intérêt du peuple? Dans ce Congo qui se veut démocratique, les jours passent et se ressemblent. Comme à l’approche de la fin de l’année 2016, le débat politique se focalise sur le thème: le peuple veut que le Raïs parte hic et nunc, par tous les moyens! Mais quand le politique parle au nom du peuple, cela ne dit pas forcément qu’il a reçu mandat de ce dernier.
Des victimes d’une démocratie imbibée d’intolérance
«Nous ne sommes pas le peuple de la Communauté internationale, nous sommes un peuple de Dieu». John Muteba, sage aux cheveux encore noire, a fait part dune allégorie parlant dune antilope qui s’est arrangé pour mettre en phase un éléphant et un hippopotame, et a fait croire aux deux mastodontes qu’ils se battaient chacun contre lui. L’antilope y représente la Communauté internationale, léléphant le pouvoir et l’hippopotame l’Opposition.
Et le peuple y est représenté par l’herbe qui souffre sérieusement du conflit entre les deux géants. L’image renvoie aux sombres événements des mois de septembre, octobre, novembre et décembre 2016. Des dizaines des RD-Congolais, civils ou policiers, sont morts, pas que sous les coups de balle ou de matraque, mais aussi au nom d’une démocratie imbibée d’intolérance.
Je revois encore le corps sans vie de la petite fille en uniforme tuée par des manifestants au quartier Kimbangu dans la commune de Kalamu, juste parce qu’elle a commis le tort de se rendre en classe, un 5 septembre, décrété «Journée sans école» par le Rassop. Et beaucoup d’autres RD-Congolais sont tombés dans ces conditions. Sont-ils morts pour la démocratie? Ou à cause de la bêtise humaine?
On parle souvent des rapports des forces dans le jeu politique. Ce jeu est à la fois diplomatique, médiatique,… et s’illustre aussi dans la rue. Cette dernière est la plus dangereuse, parce que ses conséquences sont difficiles à contrôler. Mais, pour des politiques, elle est parfois la plus profitable. Comment? Réfléchissons.
Entre une manifestation pacifique qui se passe sans accrochage et celle qui vire au pillage et en un bain de sang, qu’est-ce qui attise plus l’intérêt des médias nationaux et surtout internationaux? La mort a toujours été un bon sujet pour la presse. Aussi suscite-t-elle l’empathie si pas la sympathie des autres peuples, et donc de la Communauté internationale.
Du coup, aux yeux des hommes politiques, il peut être normal de sacrifier quelques pions (le peuple) pour protéger le roi ou conquérir la tour dans cet échiquier. Cruel.
«Nous ne sommes pas le peuple de la Communauté internationale, mais nous sommes un peuple de Dieu»
Dans ce tableau, les religieux censés jouer le rôle de dernier rempart moral sont souvent blâmables.
Le fait d’être catholique ne m’empêche pas de reconnaître que le rôle de l’église dans la crise que traverse le pays n’est pas forcément le bon. Elle entretient souvent la confusion dans les esprits déjà tourmentés des RD-Congolais.
Tenez. L’accord signé à la Saint-Sylvestre en 2016 sous l’égide des Évêques de la CENCO avait fixé les élections présidentielle, législatives nationales et provinciales couplées au plus tard en décembre 2017, au mépris de l’expertise apportée par la CECI, OIF et autres spécialistes des élections à la Cité de l’UA des semaines avant.
L’accord prévoit aussi la possibilité de prolongation du délai. Mais les évêques en ont fait fi. Pourquoi? Une indiscrétion met la puce à l’oreille: «La date du 31 décembre 2017 n’est qu’une date choisie pour calmer les tensions, les élections ne pourront pas se tenir à cette échéance», avait confié une figure bien connue de la CENCO.
Suivez mon regard. L’abbé Donatien Nshole pourtant n’hésitait pas à confirmer que l’église attend les élections en décembre. Bizarre! Pourquoi? L’histoire nous le dira. Mais en attendant, les prélats seront autant coupables que les acteurs politiques devant la mort de chaque RD-Congolais qui serait victime de la manipulation. La coupe est presque pleine.
Hugo Robert MABIALA
Journaliste et Citoyen concerné

Laisser un commentaire