La tension était palpable jeudi 19 septembre 2024 à l’Assemblée nationale congolaise lors du vote sur la prorogation de l’état de siège en Ituri et au Nord-Kivu. Cette mesure exceptionnelle, en vigueur depuis mai 2021, continue de susciter des débats houleux au sein de l’hémicycle.
Sous la présidence du premier vice-président Jean-Claude Tshilumbayi, 331 des 338 députés présents ont voté en faveur de cette énième prolongation, tandis que 4 s’y sont opposés et 3 se sont abstenus. Il convient de noter que les représentants des provinces directement concernées, à savoir le Nord-Kivu, l’Ituri et le Sud-Kivu, n’ont pas pris part au scrutin, marquant ainsi leur désapprobation silencieuse.
Le projet de loi a été défendu avec vigueur par le ministre de la Justice, Constant Mutamba. Celui-ci a rappelé l’ordonnance du Chef de l’État, soulignant que cette mesure vise à « éradiquer les forces du mal et restaurer la paix dans l’Est de notre pays ». Néanmoins, cette justification n’a pas convaincu tous les parlementaires.
Parmi les voix dissidentes, Justin Bitakwira s’est fait particulièrement entendre. « On ne traite pas un malade sans entendre ses plaintes. C’est nous qui subissons la guerre », a-t-il tonné, exprimant ainsi le sentiment d’impuissance ressenti par de nombreux habitants des régions touchées. Il a par ailleurs lancé un appel direct au président de la République, l’exhortant à écouter les populations locales pour mettre fin au conflit.
Dans la même veine, le député Willy Mishiki a remis en question l’efficacité de l’état de siège. « L’état de siège a montré ses limites. Aucune ville n’a été récupérée depuis que cette mesure existe », a-t-il déclaré, pointant du doigt l’absence de résultats tangibles malgré les restrictions imposées.
La décision de proroger l’état de siège a été prise dans un contexte de violence persistante dans l’est du pays. Des groupes armés continuent de semer la terreur, mettant à rude épreuve la patience des populations locales et la détermination du gouvernement. La situation humanitaire reste préoccupante, avec des milliers de déplacés et une insécurité chronique.
Malgré les critiques, le gouvernement maintient que l’état de siège est nécessaire pour rétablir l’ordre et la sécurité dans les provinces touchées. Cependant, l’absence de progrès significatifs après plus de deux ans de mise en œuvre soulève des questions quant à l’efficacité de cette stratégie.
Le gouvernement devra redoubler d’efforts pour convaincre une population de plus en plus sceptique de la pertinence de ses choix stratégiques. Dans ce climat tendu, seul l’avenir dira si cette énième prorogation de l’état de siège sera la dernière ou si le feuilleton est appelé à se poursuivre.
Josué KALUBI