Le chef de l’Etat présente ce mardi son projet pour «refonder» l’Europe mais il devra tenir compte de la fragilisation d’Angela Merkel, sa principale partenaire.
Transposer à l’UE la méthode En Marche !
Certes l’ambiance est un peu gâchée par le verdict des urnes. Non seulement Merkel, avec qui Macron s’est déjà entretenu deux fois au téléphone depuis dimanche, enregistre le pire score de la CDU depuis 1949, mais encore voit-elle arriver à l’Assemblée une extrême droite dopée par la crise des migrants. Et elle devra sans doute gouverner avec les libéraux du FDP, ouvertement eurosceptiques. En clair, la lune de miel franco-allemande féconde sur laquelle tablait le chef de l’Etat paraît compromise. «Il n’y a pas de modification du discours à cause de tel ou tel événement», jure néanmoins un conseiller élyséen. Le chef de l’Etat a travaillé et retravaillé de sa main cette allocution, le troisième temps fort de sa séquence européenne après le discours aux ambassadeurs à la rentrée puis celui d’Athènes.
Cette Europe doit d’abord être «plus lisible et plus démocratique». D’où la proposition de consulter les opinions des vingt-sept. Emmanuel Macron souhaite transposer à toute l’UE la méthode utilisée par En Marche ! pendant la campagne : des conventions démocratiques seraient organisées dès le premier semestre 2018 en France et chez les pays membres… à condition qu’ils acceptent. «Le but est d’impliquer tous les citoyens dans des espaces de débat, de délibération, pour faire remonter les idées, les envies, les doléances», fait-on valoir à l’Elysée. Selon nos informations, un questionnaire commun est envisagé.
Ministre, Parlement et budget de centaines de milliards d’euros pour la zone euro
Quid des europhobes qui ont de plus en plus de poids dans la plupart des États membres, de la Pologne à l’Italie, de l’Autriche à la Grèce, en passant par la France et l’Allemagne ? «C’est une incitation pour les partis proeuropéens à défendre le projet commun», balaye un diplomate de haut rang.
Autre pilier sur lequel le chef de l’Etat ne manquera pas de revenir, la réforme de la zone euro. Pour la rendre plus efficace et plus démocratique, les Français ambitionnent de la doter d’un ministre des Finances, d’un Parlement et, plus sensible encore, d’un budget de plusieurs centaines de milliards d’euros. «En France, on a tendance à voir une zone euro renforcée comme une alternative à l’Europe des 27. Mais attention, avertit Sylvie Goulard, ministre éclair de Macron et grande spécialiste de l’Europe, ce n’est pas la vision des Allemands. Eux ont toujours le souci d’être inclusifs vis-à-vis des autres pays, même les petits.» «Si l’on cherche sur chaque thème le plus petit dénominateur commun, on n’avancera pas», rétorque l’Elysée.
A la Sorbonne, le plus proeuropéen des présidents donnera sans nul doute du souffle et de l’audace au projet européen. Il lui restera à convaincre ses partenaires. Et sa propre opinion publique.
Le Parisien