Nord-Kivu : « Watoto », chanson de l’artiste musicien Popal Ise pour sensibiliser sur la protection des enfants

Le 20 novembre de chaque année, c’est la Journée internationale des droits de l’enfant. Pour cette année 2023, la date est célébrée sous le thème : « Pour chaque enfant, tous ses droits ». A l’occasion , Journaldesnations vous présente la chanson « Watoto » [les enfants en français ,ndlr]. Dans ce morceau de 5 minutes 7 secondes lancé depuis juin 2006, l’auteur-compositeur Popal Ise décrit le calvaire des enfants de l’Est de la République Démocratique du Congo causé notamment par la persistance des conflits et violences armées. Entretien réalisé à partir de Butembo, une des grandes villes de la province du Nord-Kivu.

Journaldesnations : Popal Ise, vous êtes artiste musicien écologiste, mais en juin 2006, vous avez chanté « Watoto », pourquoi ce morceau?

Popal Ise : Merci beaucoup pour la question. Pour moi, c’est vraiment l’hymne dédié aux enfants parce que tout le monde est passé par la période d’enfance. Alors, je me suis dit, il faut que je fasse quelque chose en faveur des enfants marginalisés dans la société dans le cadre de plaidoirie.

Journaldesnations: Quel est l’essentiel qu’on peut retenir de la chanson?

Popal : Et que ces enfants sont humains. Il faut les soutenir moralement, physiquement, financièrement et surtout psychologiquement. Suite à la guerre depuis des décennies, les enfants du Kivu grandissent dans des conditions non favorables. A cause des violences armées, ils escadalent des collines pour se mettre à l’abri. Déplacés dans des milieux de refuge, ils y arrivent sans habits, ils dorment sans manger, ils ont perdu leurs parents, ils n’ont pas le goût de vivre. Voilà ce que j’explique dans « Watoto ».

Journaldesnations: Dans notre région, comment vous trouvez la protection des enfants?

Popal : Dans la ville de Butembo par exemple, les enfants sont encore dans le circuit commercial. Ils vendent des beignets, des arachides, des sachets, des ananas, des cahiers. Chose étonnante : ils font ce business aux heures des cours. Ce qui signifie qu’ils ne partent pas à l’école au vu et au su des autorités. Et ici, on dit souvent que c’est par ce canal que les grands opérateurs économiques de la vie sont passés pour émerger. On essaie de positiver le malheur des enfants. Avec cette chanson chantée en swahili, j’ai dit : « nao ni watu, tuwaunge mkono », pour dire nous devons les soutenir pour accomplir leurs rêves. J’ai donné ma part étant qu’artiste. Vous faites autant comme journaliste. Et les pasteurs dans des églises font la même chose. L’enfance est une période qui a besoin d’un soutien des adultes pour leur garantir un meilleur avenir.

Journaldesnations : Dans la région de Beni-Butembo, disons dans la grande partie de l’Est, les enfants sont également confrontés par l’insécurité causée par l’ADF, le M23 et les milices locales. Quel est votre message aux uns et aux autres ?

Popal : Dans la chanson, nous avons décrié cette insécurité qui pousse de nombreux orphelins dans la rue parce que leurs parents ont perdu la vie. Soit les mineurs sont pris de force pour prendre les armes. Alors, à tous les groupes armés cités, les enfants n’ont pas de la place dans ce circuit. Je profite également, comme nous sommes en période électorale, de rappeler aux acteurs politiques que les enfants ne doivent pas être utilisés pour battre campagne à qui que ce soit. Qu’on laisse les enfants dans l’éducation.

Journaldesnations: La ville de Butembo est dépourvue d’un centre d’encadrement des enfants après les cours soit pendant les vacances. Quel plaidoyer à leur faveur ?

Popal : Ça c’est très important. Je m’adresse plus aux autorités coutumières et administratives. Je pense l’urbanisation de la ville a été mal faite. S’il y a un autre lotissement comme les ville est en train de s’épanouir, même ailleurs, songez toujours aux espaces où on peut construire des centres culturels, des cercles sportifs. Ça permet aux enfants de se détendre après les cours. Les jeux qu’ils peuvent appliquer peuvent contribuer à leur bonne santé, et développer leur capacité intellectuelle. Dans le temps, nous étions encadrés par des clergés. Les opérateurs économiques qui nous construisent des salles de mariage au quotidien doivent aussi penser aux espaces pour l’encadrement des enfants. « Nao ni watu tuwaunge mkono ».

Propos recueillis par Djiress BALOKI/correspondant journaldesnations.net au Nord-Kivu