Tout a commencé par une bataille rangée mercredi 08 mai 2019 dans l’avant-midi au siège de cette formation politique.
Chose étrange mais pourtant vraie. Un groupe de combattants appuyant le président de la Convention démocratique Victor Wakwenda ainsi que le président de la Commission électorale permanente de l’UDPS Jacquemin Shabani a débarqué sur les lieux dans le but de procéder à l’installation du Directoire chargé d’assurer l’intérim du Président du parti fondé pour combler le vide créé par l’élection du président Félix Tshisekedi, appelé aux plus hautes fonctions au sommet de l’Etat.
Ces deux cadres de direction de l’UDPS/Tshisekedi fondent leur action sur la mise en application de l’article 26 des statuts du parti qui préconise l’installation d’un triumvirat d’une durée ne dépassant pas 30 jours, composé du président de la Convention démocratique, du Secrétaire général et du président de la commission électorale de l’UDPS. Ce directoire est chargé de convoquer un congrès extraordinaire devant déboucher sur l’élection du nouveau président du parti.
Coup de théâtre mercredi quand, à son arrivée au siège, le groupe à Wakwenda et Shabani a été pris à partie par d’autres combattants restés fidèles à Jean-Marc Kabund, président intérimaire de l’UDPS désigné à ce poste par Félix Tshisekedi lui-même.
C’est ce qui a mis le feu aux poudres au point de dégénérer dans des voies de faits avec plusieurs blessés graves à la clé. La Police a dû intervenir pour rétablir l’ordre en dispersant les deux groupes antagonistes.
Pouvoir discrétionnaire du chef du parti ou dictature? L’opinion se souviendra de l’annonce faite le 27 avril 2019 par Victor Wakwenda sur la prise des fonctions par le directoire, en remplacement de Félix Antoine Tshisekedi élu Président de la République.
«Constatant que le président du parti élu pour 5 ans au 1er congrès extraordinaire de mars 2018 est constitutionnellement mis en disponibilité pour cause d’incompatibilité des fonctions -article 96-, la CDP met en place ce jour le directoire composé du président de Convention démocratique du parti, du secrétaire général et du président de la Commission électorale permanente conformément à l’article 26 des statuts», avait prévenu Wakwenda. Dans son entendement, cette tache devrait incomber au trio Wakwenda-Kabund-Shabani et nullement à une seule personne.
Or, deux jours avant la cérémonie de prestation de serment au Palais de la Nation, le président Tshisekedi a pris le soin de désigner le secrétaire général Jean-Marc Kabund pour assumer seul son intérim. Le président Fasthi est mieux placé pour livrer les mobiles profonds qui l’ont poussé à prendre une telle décision. Dans l’euphorie de la victoire, cadres et combattants de l’UDPS ont préféré taire leurs divergences et savourer pleinement ce résultat qui propulsait leur président à la magistrature suprême du pays. Cette accalmie n’a été que de courte durée car quatre mois après, les caciques du parti sont venus à la charge pour remettre de l’ordre dans la boutique en se basant sur les dispositions pertinentes des statuts de l’UDPS.
Les dispositions pertinentes des statuts du parti énervées
Selon les sources proches de la 10ème rue Limete, des rencontres préliminaires des dirigeants de l’UDPS ont eu lieu dans le but de baliser la voie à la passation civilisée du pouvoir à la tête du parti dans la foulée de celle survenue au sommet de l’Etat. Alors que tout le monde semblait émettre sur la même longueur d’ondes, l’opinion a été désagréablement surprise d’assister à des confrontations dramatiques entre les combattants de ce parti qui a toujours prôné la non-violence comme mode de gestion.
Le président sortant de la fille aînée de l’Opposition avait-il mûrement réfléchi avant de confier les rênes du parti entre les mains de Jean-Marc Kabund? Les sages de l’UDPS n’avaient-ils pas pris des dispositions en amont pour éviter d’énerver les dispositions des statuts sur lesquels Wakwenda et Shabani fondent leurs revendications pour remettre le train sur le rail?
Les affrontements sanglants de mercredi 08 et jeudi 9 mai viennent de projeter à l’écran un mécontentement qui couvait depuis plusieurs mois. La vague est venue de loin. Déjà l’on a remarqué à l’époque des fissures dans la bâtisse surtout au lendemain de la mort de Dr Etienne Tshisekedi wa Mulumba, icône incontournable qui rassemblait tous les courants et gérait convenablement tous les tempéraments ainsi que les ambitions des uns et des autres.
L’UDPS a toujours surmonté les dures épreuves
Le moment est-il propice pour ce genre de dérapages publics dont les effets collatéraux peuvent porter ombrage au chef de l’Etat dont la base risque de voler en éclats dans les luttes de positionnement des cadres? Et pourtant, l’UDPS a été confrontée à plusieurs écueils de taille qu’elle a toujours surmontés grâce à la sagesse et la maturité de ses membres. Comment les combattants en sont-ils arrivés à ce point?
Plusieurs réactions ont été enregistrées après ces bagarres entre les fils de la même famille. Comme celle de Corneille Mulumba, membre co-fondateur de l’UDPS: «l’UDPS défend l’Etat de droit et le respect des textes. Cela commence en interne par le respect strict de ses propres statuts afin de donner le bon exemple et servir de modèle». Clair que Mulumba vise Félix Tshisekedi, celui qui a catapulté Kabund à la direction du parti en violation des dispositions des statuts relatives à l’intérim du président.
Dans un communiqué publié jeudi 09 mai 2019, il a indiqué que «seul le triumvirat composé du président de la Convention démocratique, le président de la Commission permanente du parti et du Secrétaire général peut assurer pendant un court moment, l’intérim du président du parti».
Dans une interview accordée à AfricaNews, -à lire dans ces colonnes- Dr. Eteni Longondo, l’un des secrétaires généraux adjoints de l’UDPS, reconnait que le triumvirat peut diriger le parti. «Nos statuts disent que lorsque le président est empêché définitivement, ce triumvirat peut diriger le parti. Mais dans le cas d’espèce, le président Félix Tshisekedi estime qu’il n’est pas empêché définitivement puisqu’il assume les fonctions de magistrat suprême pendant 5 ans à la tête du pays et il peut rentrer au parti à l’échéance», argumente-t-il, précisant que la question de succession n’est pas à l’ordre du jour à l’UDPS. Que pense Fatshi de la légalité de son acte et de sa conformité ou non avec les statuts de l’UDPS? Voici que le mandat constitutionnel du Président de la République dure également 5 ans. Dire que le président de l’UDPS n’est pas définitivement empêché équivaut à entretenir la confusion, rétorque-t-on dans le camp de Wakwenda et Shabani.
Contacté au téléphone par AfricaNews, le porte-parole de l’UDPS, Paul Tshilumbu, s’est réservé de tout commentaire sur ces affrontements internes à l’UDPS.
Octave MUKENDI/AfricaNews